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Le blog des Bactéries et de l'Evolution

Les mystères de Deinococcus radiodurans dévoilés

25 Octobre 2006 , Rédigé par Benjamin Publié dans #Microbiologie

L'article sur Deinococcus radiodurans vous avait sûrement intrigués, du fait des stupéfiantes et non moins mstérieuses caractéristiques de cette bactérie. C'est bien légitime. C'est dans l'équipe de Miroslav "Miro" Radman, affiliée à l'INSERM et sise à la faculté de l'hôpital Necker que les bases moléculaires de l'étonnante résistance de Deinococcus ont été découvertes. Dans leur article1, récemment paru et commenté dans Nature (excusez du peu), il rappellent que la résistance aux radiations de Deinococcus est probablement un sous-produit de sa résistance à la dessication (scoop Bacterioblog) qui aboutit à des cassures de l'ADN (tout comme les radiations ionisantes et un paquet de poisons). Pour simplifier, disons que Deinococcus est capable  de remédier à des cassures de son ADN pourvu que les fragments soient plus longs que 10 000 paires de bases seulement (contre 500 000 pour E. coli) grâce à plusieurs propriétés :
1-les copies de son génome qu'elle conserve (le chromosome et les mégaplasmides sont présents en 4 à 12 exemplaires);
2-une réplication intense de l'ADN,  similaire à une PCR car les fragments d'ADN y jouent un rôle d'amorces;
3-des fonctions de recombinaisons permettent de réassembler un chromosome en partie neuf (n'hésitez pas à demander des précisions dans les commentaires).
Il est étonnant que toutes ces caractéristiques ne soient pas nouvelles individuellement, mais Deinococcus radiodurans, "l'étrange baie résistante aux radiations", les combine et les exploite à fond pour survivre, ce qui illustre encore une fois le "bricolage moléculaire" et le pouvoir de l'évolution.


J'ai déjà évoqué les possibilités d'application d'une bactérie au tel potentiel ; l'identification des bases moléculaires de ce potentiel permettrait d'exporter ce système chez une autre bactérie d'intérêt. Je lance donc dans les commentaires ci-dessous un concours d'innovation où la meilleure application des talents de Deinococcus sera récompensée par mon admiration.

1. Ksenija Zahradka, Dea Slade , Adriana Bailone, Suzanne Sommer, Dietrich Averbeck, Mirjana Petranovic, Ariel B. Lindner and Miroslav Radman Reassembly of shattered chromosomes in Deinococcus radiodurans. Nature 443 569-573 (2006).

Toutes mes félicitations à Ariel, à qui ce billet est dédicacé (s'il échoue ici un jour).
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F
Je dirais que le génôme n'est que "stabilisé" par ce processus de réparation (contre les cassures), le processus de mutation continuant dans les sauvegardes, on peut le considérer en pratique comme indépendant de la réparation. <br /> D'un autre point de vue on pourrait dire que si ça sauve des mutations surnumériques et archaïques, celà laisse la place suffisante aux mutations. Ce suffisamment n'étant pas a priori, car la biologie n'est pas finaliste, on devrait plutot dire que ceux qui se protègent trop des mutations sont moins aptes à s'adapter, ceux qui se protègent trop peu sont cramés, et ceux qui passent entre les deux forment leur lignée.<br /> Docteur Benjamin, quid de celà?
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B
Suite à vos commentaires, jai quelque peu modifié l'article, qui devrait être plus clair.Pour ce qui est de "l'évolvabilité" de Deinococcus (pardonnez-moi cet anglicisme): -des mutations peuvent toujours survenir sur un chromosome de la même façon que chez E. coli, peut-être pas exactement à la même fréquence. En effet, les propriétés qui  aboutissent à la résistance de Deinococcus sont présentes chez E. coli.-Deinococcus possède plusieurs copies de son génome, ce qui ne fait que retarder l'avènement d'un individu "homozygote", ne portant que les allèles mutés sur ses multiples chromosomes.Donc qualitativement, rien ne change quant à l'évolvabilité de cette bactérie. En revanche, le fait qu'elle exprime des fonctions de recombinaison très efficaces pourrait changer quantitativement l'impact des transferts génétiques horizontaux (i. e. entre bactéries de la même génération) qui impliquent ce genre de mécanisme.
L
J'ai une question : Ce processus permet à une lignée de percer les siècles sans que son génôme ne soit changé. Or on sait que les mutations, et leur caractères parfois bénéfique permettent aux individus de s'adapter de la façon la plus adéquate et rapide possible aux changements de son environnements. Autrement dit une espèce qui perd cette faculté de muter reste inerte, rétrograde et devient assez vite inadaptée, puis hors compétition par rapport à ses concurentes adaptables au génôme plastique...Quid de Deinococcus ?
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R
J'avais pas  vu le commentaire de Fed, et j'allais mettre le même concernant Deinococcus vs E.coli... Reformule, sacrebleu !
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F
 On pourrait transférer les gènes de Deinococcus chez Raël, afin qu'il devienne résistant au refroidissement de la planète. Sinon tu dis que E. coli peut remédier à des cassures de son ADN supérieures à 500 000 paires de bases (contre 10 000 pour "Conan la bactérie" de son petit surnom), ça veut dire qu'elle est carrément plus balèze!? Tu te serais pas gouré un peu?
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B
Gouré? tu rigoles?E. coli ne peut réparer son génome s'il est fragmenté en morceaux de moins de 500 000 pb, contre 10 000 pour Deinococcus. Le texte n'est peut-être pas assez précis, j'en conviens et j'arrange ça.